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Je célèbre le Gamou, pour célébrer la paix et la convivialité (par Dr Mor Talla Cissé SG )

En ce jour béni, correspondant à lanniversaire de la naissance de lélu, le Prophète de lIslam, notre maître et guide, Mohamed (PSL), il me plait de vous adresser, chers frères et sœurs, mes souhaits et mes vœux les plus ardents. Que Dieu, Le Très Haut, fasse que nous le célébrions encore des années et des années, toujours dans la ferveur et dans la convivialité.
Que la paix et le vivre ensemble (qui caractérisent notre société) perdurent. Que le Seigneur nous épargne les maux dont souffrent le Moyen-Orient et une bonne partie du monde moderne.
Au moment où nous baignons dans l’allégresse, dans la joie et dans la ferveur religieuse, des femmes innocentes se font abattre, des enfants impuissants, sans aucun avenir, pleurent leurs pères engloutis dans la terre ou brûles, leurs corps déchiquetes. Jamais le monde ne va aussi mal. Vous m’épargnez la peine d’énumérer les causes, ou d’expliquer les motifs de ce desastre humain, de cette catastrophe inouie. La violence est, aujourd hui, le seul langage que certains groupuscules connaissent pour communiquer avec les autres. Elle fonde, disons-nous, l’argumentaire le plus solide dans ce monde de caricatures et de contradictions.
Nous, Sénégalais, avons appris, fort heureusement, que le monde est, depuis toujours, caractérisé par la pluralité et l’altérité. Nous avons, depuis toujours, la pleine conscience que nous pouvons vivre ensemble, tout en étant différents. Différents dans nos conceptions philosophiques, différents dans nos consciences religieuses et différents dans nos options et choix politiques. Car nous sommes nés libres, libres dans nos pensées, libres dans nos choix ;
nous sommes libres et surtout quittes avec notre conscience.
Cette liberté fondamentale dont jouissent les Sénégalais prend racine dans leur histoire, dans leur culture et dans leur civilisation. Tout chercheur qui nourrit l’intention d’étudier la société sénégalaise, dans sa diversité culturelle et civilisationnelle, doit nécessairement tenir en considération les différents apports qui alimentent ladite diversité. Il sagit du fonds négro-africain, des influences de la civilisation occidentale et des apports de la civilisation arabo-islamique. Avec ces différents apports, le Sénégal a pu construire une culture hybride, mais forte et dynamique.
C’est grâce, d’ailleurs, à cette diversité culturelle, pleinement assumée, que notre patrie a éte considérée, en tout cas jusqu’à une date récente, comme lun des pays africains les plus paisibles et les plus stables. Et ses populations attachées à leur legs et à leurs acquis traditionnels, dans une certaine mesure ; mais aussi ouvertes aux différentes cultures et civilisations.
Ce legs ancestral de paix, construit avec des matériaux de la foi et du respect mutuel, a été entretenu par les différentes générations jusqu’à ce qu’il nous soit légué, le flambeau toujours rayonnant. Car comme l’autre le disait, être fidèle aux foyers des ancêtres, cest d’en transmettre le flambeau et non d’en conserver les cendres
Ce flambeau a été porté, haut, par des maîtres spirituels, des éducateurs et des érudits hors-pair, dévoués à la cause nationale, qui ont laissé leurs empreintes indélébiles sur le sol et dans les cœurs des Sénégalais ; des Sénégalais amoureux de la paix et de la justice. Ces maîtres ont construit des écoles, érigé des mosquées, fait vivre des Zâwiyyah. Et ils ont surtout fondé des villages, qui sont devenus, en moins de cent ans, des centres urbains et des chefs-lieux d’Arrondissements. Ils ont formé des hommes et des femmes qui sont devenus des leaders incontournables, dans le pays, et sur tous les plans. Pour comprendre tout cela, il faut revisiter l’histoire du Sénégal, notamment dans sa période charnière qui correspondait à l’achèvement de la colonisation française et à l’occupation du pays par les étrangers.
Dans l’histoire de l’expansion de l’Islam au Sénégal, cette phase est désignée par le terme « 1 Islam confrérique»; la phase précédente étant qualifiée de l’Islam jihâdiste ou l’Islam guerrier: Cette période, qui commence avec la deuxième moitié du 19eme siècle, était marquée par trois faits historiques majeurs :
1) La mort de tous les jihâdistes, qui avaient pris les armes pour mener des guerres saintes.
Des considérations socioculturelles m’empêchent de citer des noms, par respect à leurs familles et à leurs disciples ;
2) La chute des monarchies traditionnelles, notamment dans le centre du pays. Il faut rappeler les derniers Damels (Samba Laobé FALL et Lat Dior Ngoné Laty DIOP) furent, tous les deux, tués en octobre 1886; et Alboury NDIAYE, le Bourba-Djolof, fut exilé au Niger, pour mourir à Dosso en 1902 ;
3) L’achèvement de la colonisation, qui a été entamée par Faidherbe, avec l’annexion du Walo en 1855.
Il résulte de ces trois faits historiques majeurs des conséquences graves. La première est un vide politique laissé par les souverains traditionnels, tués ou exilés. Il n’y avait plus lautorité legitime qui incarnait lame senegalaise, pouvant prendre en charge les aspirations des populations. Il sensuit, donc, une crise aigüe qui n’épargnait aucun secteur de la vie nationale. L’Islam était orphelin de ses protecteurs, qui luttaient, à la fois, contre l’aristocratie dite païenne et les forces d’occupation, venues d’ailleurs.
Cette situation inédite interpellait l’intelligence de l’élite musulmane qui devrait changer de stratégies et de methodes, non seulement pour continuer les efforts déployés par l’ancienne génération (guerrière) dans le processus de l’expansion de l’Islam, mais surtout pour protéger les Musulmans, qui avaient besoin de paix, d’écoles, de lieux de cultes, de terres et des moyens leur permettant de subvenir à leurs besoins.
Cest à partir de ce moment qu’émergea une forme de l’Islam, qui se développait au Sénégal, depuis le milieu du XIXeme siècle. Cet Islam est qualifié de « Confrérique », puisque comprenant des groupements religieux organisés autour d’un maître pour promouvoir l’Islam, selon une ligne doctrinale mystique déterminée.
C’est done cet Islam qui a essaimé en Afrique saharienne et subsaharienne; chaque Cheikh transmettant sa baraka (connaissance intrinsèque) à un autre maître. L’importance est que ladepte, à travers une chaîne ininterrompue (Silsila) de Cheikhs porteurs de la baraka, puisse correspondre avec le Prophète (PSL), et de là avec Dieu.
Les promoteurs de cet Islam au Senegal, ont remplacé les armes par la plume. Ladoption de cette nouvelle approche, etait dictée par la situation politique qui prévalait et la faiblesse des moyens militaires et logistiques dont disposaient les dirigeants des mouvements islamiques. C’est pourquoi, ayant analysé la situation et ayant vécu au Fouta, au Walo, au Djolof, au Baol, au Saloum et au Cayor (où se déroulaient les guerres saintes les plus féroces), les nouveaux chefs religieux se sont fait une idée de la guerre sainte et ont préféré s’engager dans le jihad de l’âme dont l’arme principale est la science et la spiritualité.
Il faut signaler que les conditions historiques de l’implantation de cette forme de l’Islam, lui ont donné un caractère confrérique qui le singularise aux yeux des tenants des autres formes d’expression islamique. Des auteurs décrivent les principales caractéristiques de lIslam confrérique ou soufi et sa base doctrinale en ces termes: «Cet Islam soufi présente comme une tendance, mystique, un effort pour dépasser le formalisme et prévenir la décadence qui menace la foi par un développement spirituel et un approfondissement de la vie intérieure ».
En effet, il sagit d’une «…Tentative pour interpréter et donner, grâce à une expérience vécue, un fondement réaliste à la conception islamique du monde et au phénomène de la prophétie; il réalise une véritable introversion et enrichit par-la, la théologie-musulmane dont il renouvelle l’inspiration ».
Le renouvellement de l’inspiration de la théologie musulmane a eu comme vecteur léducation spirituelle, qui se passe essentiellement dans les demeures des Cheiks, transformées en de véritables écoles, et dans leurs Zawiyyah, c’est-à-dire dans des centres d’enseignement islamique, places sous l’autorité de ces Cheikhs ou de la confrérie. Ces centres et ces Zâwiyyah ont beaucoup contribué à l’islamisation des Sénégalais. Les chefs des confréries ont joué, donc, un rôle déterminant dans l’histoire de l’Islam au Sénégal, sur tous les plans: socioculturel, politique et économique. Les Cheikhs ont su canaliser au profit de l’Islam le mécontentement populaire né des guerres, des exactions des Ceddos (souverains traditionnels non-musulmans et leurs soldats) et des luttes intestinales dans les cours royales.
Si les chefs religieux ont réussi une telle mobilisation des populations, c’est parce qu’ils étaient d’une conduite sans reproche ; et avaient de profondes connaissances de la langue arabe, du Coran et de lIslam. Ils disposaient aussi de beaucoup de livres religieux, des livres qui traitaient de tout, de l’histoire du monde à larithmétique, en passant par la jurisprudence islamique, l’astronomie et la logique, etc. Mais il faut surtout ajouter à ces éléments, qui ne sont que des instruments, leur foi en Dieu, leur dévouement à l’Islam, leur détermination et leur charisme, pour ne pas dire leur sainteté. La connaissance profonde de l’Islam des tenants des ordres soufis était doublée d’une vie religieuse intenses non seulement des maîtres spirituels, mais aussi des adeptes.
Tout cela a fait que les populations qui, pendant la période coloniale, se trouvaient dans le desarroi, se mirent derrière les chefs religieux qui leur offraient une protection tant spirituelle que matérielle, en fondant des villages, des bourgades et des hameaux ; et en organisant des espaces dans lesquels une nouvelle intégration sociale s’est réalisée. Dans ces espaces les maîtres spirituels se portaient garants des valeurs traditionnelles comme la solidarité, le respect mutuel et l’observation des règles morales qui contribuaient à instaurer une cohabitation pacifique et harmonieuse entre ces populations venues de divers horizons.
Par ailleurs, l’effort de reconstruction de la société entreprise par les nouveaux maîtres, ne s’est pas limité à regrouper les Musulmans et à leur donner un cadre social de réinsertion et de réintégration. Ils se sont aussi évertués à mobiliser leurs énergies pour leur donner des moyens de subvenir à leurs besoins et de vivre dans la paix et dans la quiétude. Ces maîtres ont done offert aux populations qui ont quitté leurs familles et leurs villages, des espaces où elles pouvaient exercer des activités économiques génératrices de revenus. Des villages agricoles ont jailli partout et des possibilités de reconversions professionnelles offertes à certaines catégories de personnes appartenant à des classes sociales dites inférieures. Et ainsi, les conditions d’existence des populations s’améliorent significativement. Nest-ce pas là le rôle primordial de lIslam dont la vocation est la réalisation du bien-être des communautés humaines, dans l’agrément divin ?
En outre, pour former spirituellement les adultes et inculquer aux Musulmans les valeurs islamiques, ils ont adopté (en plus des moyens formels de l’éducation et des Wirds), des stratégies inspirées des traditions locales et des coutumes du pays. Sachant que tous les peuples ont des fêtes diverses, ils ont organisé des veillées et des manifestations religieuses au cours desquelles les enseignements et l’histoire de lIslam sont revisites. Ils en profitaient aussi pour aborder des questions societales qui préoccupaient les membres de la communauté, ou pour mettre en évidence des valeurs sociales, comme le travail, la préservation de la dignité humaine, l’honnêteté, la patience, le Ngor et le Jom, entre autres valeurs qui faisaient parties des thèmes récurrents que les conférenciers et autres orateurs abordaient au cours de ces cérémonies religieuses.
La célébration de l’anniversaire de la naissance du Prophète élu (PSL), était une occasion propice pour aborder ces valeurs qui fondent notre philosophie morale, en tant que Sénégalais. Ces valeurs, qualifiées de « centrales » par des auteurs, comme le Professeurs
Bassirou DIENG, étaient cultivées au sein de la société sénégalaise, bien avant l’arrivée de l’Islam. La religion n’a fait que les bonifier, en les hissant au rang de culte.
Il y a, aussi, des histoires et des exploits réalisés par des figures historiques qu il faut valoriser dans la construction des systèmes de référence. La date du 18 Safar, dont la célébration est instituée par Cheikh Ahmadou Bamba en 1921, fait partie de ces évènements historiques qu’il faut rémomorer. Car il s’agit de célébrer l’anniversaire de son arrestation et de son exil au Gabon.
Sagissant des enseignements qu’il faut en tirer, nous nous limitons à dire que la dimension historique du Magal, par exemple, interpelle ainsi les disciples mourides qui doivent réfléchir sur les motifs de l’arrestation du Cheikh, les implications des chefs locaux (qui déposaient des plaintes), les épreuves qu’il a endurées, et leurs conséquences sur la vie de la communauté mouride, aussi bien sur les plans politique, religieux que social. Cette réflexion doit les amener à accorder la priorité aux aspects spirituels de cette célébration.
Dailleurs, en dehors de toute considération religieuse, les célébrations et les fêtes constituent des données sociologiques. Comme l’a dit un auteur, la fête fait partie des événements majeurs de la vie sociale. C’est une occasion pour les membres d’un groupe de se retrouver, de partager une série d’activités qui, en suscitant tout un monde d’émotions et de sentiments, réactivent le sens du collectif. Car les fêtes et les célébrations remplissent trois fonctions sociologiques qui s’articulent autour de l’ordre social : elles modèlent, représentent ou présentent l’ordre social.
Dans notre societé, les Gamou, Magal et autres Daaka, remplissent ces différentes foncions sociologiques. Ces célébrations constituent des moments de communion et d’expression de foi ; mais aussi des moyens de raffermissement des liens qui unissent les membres dune communauté donnée. Chaque communauté, chaque peule, chaque pays célèbre quelque chose.
Les uns célèbrent leurs hérauts ou héros nationaux, d’autres leurs indépendances. Car il s’agit d’une reconnaissance de la communauté ou de la nation. De telles célébrations donnent aux uns et autres « l’occasion d’un retour aux sources, naturelles ou nationales, qui ont, dans l’esprit de chacun, un sens sacré». Elles font partie des outils de construction des systèmes de reference, surtout dans ce monde caractérisé par des quêtes d’identités culturelles et sociales.
Il ressort de ce qui précède que la célébration des évènements religieux et nationaux, fait partie integrante de la vie sociale de toutes les nations. Au Senégal, elles ont une autre dimension, puisquétant le reflet des aspects de l’expression de la civilisation et de la culture arabo-islamiques, ce qui constitue un élément important de la vie des populations. En effet, nous pourrons inscrire ces célébrations dans le cadre des études sur les apports culturels de la civilisation arabo-islamique.
Sous ce rapport, l’analyse que nous en faisons revêt un caractère global, car elle porterait sur la trajectoire de l’Islam au Sénégal et la construction des systèmes de valeurs et de références, dans le projet de société que les chefs religieux proposaient aux Musulmans dans un contexte caractérisé par le colonialisme et par des crises multiples.
S’agissant des impacts socioculturels et économiques de ces célébrations, il faut les chercher, au-delà des considérations spirituelles, dans les dynamiques de paix et de stabilité qu’elles déclenchent. Elles peuvent ainsi apporter des éléments explicatifs aux phénomènes sociaux constates aujourd hui dans notre pays, et dans les mécanismes de résolution de conflits.
Pour les aspects purement spirituels, on peut les expliquer dans les rapports verticaux et horizontaux que les Musulmans entretiennent avec leur Seigneur et avec leurs guides spirituels.
Quand Ahmadou Bamba appelait ses fidèles à célébrer l’anniversaire de son arrestation et de son départ pour l’exil au Gabon, il visait un objectif précis. Il sagissait d’exprimer sa gratitude, à l’endroit de son Seigneur, pour les grâces qu’Il lui a accordées. Le Cheikh dit : « Quant au Bienfait que Dieu m a accordé, ma seule et souveraine gratitude ne le couvre plus; Je demande à celui qui en a les moyens de s’associer à moi dans l’action de Grâce que je rends à mon Seigneur.
Bassirou DIENG, étaient cultivées au sein de la société sénégalaise, bien avant l’arrivée de l’Islam. La religion n’a fait que les bonifier, en les hissant au rang de culte.
Il y a, aussi, des histoires et des exploits réalisés par des figures historiques qu il faut valoriser dans la construction des systèmes de référence. La date du 18 Safar, dont la célébration est instituée par Cheikh Ahmadou Bamba en 1921, fait partie de ces évènements historiques qu’il faut rémomorer. Car il s’agit de célébrer l’anniversaire de son arrestation et de son exil au Gabon.
Sagissant des enseignements qu’il faut en tirer, nous nous limitons à dire que la dimension historique du Magal, par exemple, interpelle ainsi les disciples mourides qui doivent réfléchir sur les motifs de l’arrestation du Cheikh, les implications des chefs locaux (qui déposaient des plaintes), les épreuves qu’il a endurées, et leurs conséquences sur la vie de la communauté mouride, aussi bien sur les plans politique, religieux que social. Cette réflexion doit les amener à accorder la priorité aux aspects spirituels de cette célébration.
Dailleurs, en dehors de toute considération religieuse, les célébrations et les fêtes constituent des données sociologiques. Comme l’a dit un auteur, la fête fait partie des événements majeurs de la vie sociale. C’est une occasion pour les membres d’un groupe de se retrouver, de partager une série d’activités qui, en suscitant tout un monde d’émotions et de sentiments, réactivent le sens du collectif. Car les fêtes et les célébrations remplissent trois fonctions sociologiques qui s’articulent autour de l’ordre social : elles modèlent, représentent ou présentent l’ordre social.
Dans notre societé, les Gamou, Magal et autres Daaka, remplissent ces différentes foncions sociologiques. Ces célébrations constituent des moments de communion et d’expression de foi ; mais aussi des moyens de raffermissement des liens qui unissent les membres dune communauté donnée. Chaque communauté, chaque peule, chaque pays célèbre quelque chose.
Les uns célèbrent leurs hérauts ou héros nationaux, d’autres leurs indépendances. Car il s’agit d’une reconnaissance de la communauté ou de la nation. De telles célébrations donnent aux uns et autres « l’occasion d’un retour aux sources, naturelles ou nationales, qui ont, dans l’esprit de chacun, un sens sacré». Elles font partie des outils de construction des systèmes de reference, surtout dans ce monde caractérisé par des quêtes d’identités culturelles et sociales.
Il ressort de ce qui précède que la célébration des évènements religieux et nationaux, fait partie integrante de la vie sociale de toutes les nations. Au Senégal, elles ont une autre dimension, puisquétant le reflet des aspects de l’expression de la civilisation et de la culture arabo-islamiques, ce qui constitue un élément important de la vie des populations. En effet, nous pourrons inscrire ces célébrations dans le cadre des études sur les apports culturels de la civilisation arabo-islamique.
Sous ce rapport, l’analyse que nous en faisons revêt un caractère global, car elle porterait sur la trajectoire de l’Islam au Sénégal et la construction des systèmes de valeurs et de références, dans le projet de société que les chefs religieux proposaient aux Musulmans dans un contexte caractérisé par le colonialisme et par des crises multiples.
S’agissant des impacts socioculturels et économiques de ces célébrations, il faut les chercher, au-delà des considérations spirituelles, dans les dynamiques de paix et de stabilité qu’elles déclenchent. Elles peuvent ainsi apporter des éléments explicatifs aux phénomènes sociaux constates aujourd hui dans notre pays, et dans les mécanismes de résolution de conflits.
Pour les aspects purement spirituels, on peut les expliquer dans les rapports verticaux et horizontaux que les Musulmans entretiennent avec leur Seigneur et avec leurs guides spirituels.
Quand Ahmadou Bamba appelait ses fidèles à célébrer l’anniversaire de son arrestation et de son départ pour l’exil au Gabon, il visait un objectif précis. Il sagissait d’exprimer sa gratitude, à l’endroit de son Seigneur, pour les grâces qu’Il lui a accordées. Le Cheikh dit : « Quant au Bienfait que Dieu m a accordé, ma seule et souveraine gratitude ne le couvre plus; Je demande à celui qui en a les moyens de s’associer à moi dans l’action de Grâce que je rends à mon Seigneur.

Ce sont, donc, ces aspects spirituels qui doivent guider les disciples, quand ils célèbrent le Magal. Mais il s’ensuit que le Magal célèbre également la victoire des forces du bien sur les forces du mal. En d’autres termes, ce Magal symbolise la victoire de Cheikh Ahmadou Bamba sur les colonisateurs français. Le simple fait de le célébrer et d’en faire un jour férié, national, chômé et payé, constitue déjà une victoire éclatante. Nous ne parlons pas des autres considérations.
Pour ce qui est des disciples, nous citons une étude sur les impacts socioéconomiques du Magal qu’a réalisée l’économiste sénégalais, Moubarack LO, qui a confirmé que : k… Dans la compréhension des disciples, le Magal de Touba accroît les valeurs spirituelles, sociales et culturelles des Mourides. Les résultats issus des enquêtes sur les ménages à Touba et les Dầirah, montrent clairement que pour 81% des individus enquêtés, l’un des déterminants fondamentaux de la célébration du Magal, est dabord et avant tout, la confirmation de l’appartenance à la communauté mouride qui possède un sens très élevé du «Ndigël ».
En termes de résultats, découlant de notre analyse, nous pouvons affirmer que la célébration d’un évènement, religieux ou profane, signifie le revivre d’une manière ou d’une autre, pour en tirer des leçons, ou pour en tirer une force morale qui permet de surmonter les difficultés. La célébration des Magals et des Gamous, par exemple, remplissent ces deux fonctions. C’est un ressourcement pour les générations musulmanes d’aujourd’hui. Ils nous rappellent le cheminement spirituel de nos figures emblématiques, mais aussi les efforts qu’ils ont déployés pour propager l’Islam et pour prendre en charge l’éducation et la formation des Musulmans, de façon générale. Nous rappelons que toutes ces actions ont été menées dans un contexte d’occupation du pays par des forces étrangères qui s’opposaient au développement de l’Islam.
Et au-delà du cas des chefs religieux, un évènement comme le Magal, met en exergue le conflit perpétuel qui opposait, dans le passe, les religieux aux tenants du pouvoir temporel.
Il faut reconnaître, d’autre part, que les célébrations religieuses constituent des supports didactiques. Elles aident les fidèles à renouveler le contrat moral qui les lient à l’Islam, à travers le Prophète (PSL) et à travers les représentants de la religion musulmane dans le pays.
Les rappels faits par les chefs religieux et autres orateurs, doivent aussi aider les fidèles à reconsidérer leurs rapports avec la vie mondaine, en constatant que celui dont on célèbre l’anniversaire de sa naissance, et pour qui des millions de personnes se déplacent dans les différents foyers religieux, repose à Médine. Même ceux qui vont à Médine, ne peuvent pas le voir. Ils y vont donc pour se rappeler de ses actes, de sa foi. Ils y vont pour lui rendre hommage et de s’inspirer de sa piété et de sa détermination. Tout cela doit participer à les inspirer et à les conduire à changer de comportement, s’ils ne s’attachaient pas déjà fermement à la religion.
La mosquée, les mausolées, les cimetières, les lieux sacrés, que les fidèles visitent, ne sont que des symboles dont la fonction psychologique est de rappeler aux pèlerins qu’ils cristallisent la foi et suscitent la crainte révérencielle de Dieu.
Nous notons, également, que ces célébrations constituent une occasion pour les chefs religieux de réorienter les disciples, de les conscientiser, de leur rappeler leurs devoirs islamiques et le Lien qui les rattache au Prophète (PSL) ou aux guides spirituels. C’est aussi une occasion de réfléchir sur les difficultés de la société, en diagnostiquant les maux qui la gangrènent, et en esquissant des pistes de solutions aux problèmes soulevés. Ainsi, le discours traditionnel des differents Califes, et représentants des obediences religieuses, traite des questions souvent relatives à lactualité et aux problèmes cruciaux qui méritent de faire entendre le point de vue de l’élite musulmane.
Nous avons constaté que le discours du Calife général des Mourides du Magal de Touba (édition de 2014), était l’un des meilleurs discours jamais prononcés dans un Magal, depuis que nous suivons cette célébration. Il a été axé sur la crise des valeurs et l’amusement des populations. Tous les journaux du Sénégal ont, le lendemain du Magal, publié et commenté ce discours d’une haute facture. Le Quotidien « Enquête», la intitulé «Le sermon de Touba», avec ce titre à la Une ‹On ne construit pas un pays sur la base de la frivolite, mais avec du savoir, du travail. Il faut mettre un terme à l’amusement » Le quotidien « l’Observateur », quant à lui, affiche ce titre: «On ne peut pas bâtir un pays en s’amusant et en jouant», Serigne Sidy Mokhtar passe en revue les maux de la société et énonce des voies de sorties de crise.
Sur le plan social, on peut, donc, considérer que les Magal et Gamous (pour ne parler que ceux-là) constituent, une occasion de communion entre les différents groupes sociaux des pays, et un moyen de raffermissement des rapports entre les membres des familles qui vivent dans des régions différentes. Cest aussi un jour de joie et dallégresse où les fidèles oublient les contraintes quotidiennes pendant ces évènements, ce qui leur permet de reconstruire une nouvelle vision de la vie en se ressourçant et en réorientant leurs efforts vers des perspectives davenir plus nobles. Mais les Gamous et Magals, ce sont surtout une tribune de dialogue et d’échanges, qui permet à la hiérarchie de la religion musulmane d’attirer l’attention des disciples et des pouvoirs publics sur les problèmes qui menacent les intérêts de la nation. Et je suis convaincu que les Yéménites, dont le pays est devenu un théâtre d’affrontements des idéologies, auraient bien souhaité trouver une telle tribune d’expression de leurs divergences et de leurs préoccupations.
Il sensuit que l’expression des valeurs et des principes de l’Islam, ne peut être circonscrite dans un cadre dogmatique, restreint, où les libertés de consciences religieuses seraient confisquées.
res valeur s laciques que, dynamises, plurielles et variables Valeu sont paite dentaleur,
à l’évolution des sociétés. Cependant, la valeur sociale la plus importante, à mon avis, est la liberté de conscience. La liberté d’expression. C’est celle qui nous permet, aujourd hui, d’écrire cet article, en guise de contribution à la réflexion et au débat qui sinstaurent autour des célébrations religieuses au Sénégal. Car, pour paraphraser Cicéron, lorateur et l’homme politique romain, quand les idées se taisent, ce sont les armes qui parlent.

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Dr. Mor Talla CISSE
SG AEM ET Chargé de recherche
institut islamique de Dakar

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