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Contribution: Moussa Taye interpelle le président du CNRA Babacar Diagne

Lettre à Monsieur le président du CNRA rendue publique après dépôt

Monsieur le président,
La présidence d’une Institution comme le CNRA exige de la neutralité, de l’impartialité et de l’indépendance. J’aurai préféré vous juger par rapport à vos actes, mais je suis dans l’obligation de vous faire part de certaines préoccupations puisque vous êtes au début de votre mandat.

Institué par la loi n°2006-04 du 4 janvier 2006, le CNRA est une autorité administrative indépendante, chargée d’assurer le contrôle de l’application de la législation et de la réglementation dans le secteur de l’audiovisuel.

« Le CNRA veille en particulier, au respect de l’accès équitable des partis politiques, des syndicats et des organisations de la société civile aux médias audiovisuels dans les conditions prévues par la loi ».

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I° LA RELANCE DES EMISSIONS POLITIQUES CONTRADICTOIRES.
La RTS est par essence un media public. Elle assure, pour ainsi dire, une mission de service public. Mais, cette télévision publique s’est mise exclusivement au service d’un homme (Macky SALL), de son parti (l’APR), et de la coalition politique qu’il dirige (BBY).
A titre de rappel, et en vertu de l’article 6 de la loi précitée, « le CNRA veille au respect des dispositions légales sur le pluralisme à la radiotélévision (articles 17 à 18 sur la propagande des partis politiques, la retransmission des débats parlementaires et le pluralisme de l’information) ».
En violation de l’article précité, la RTS a complètement rayé l’opposition du service public en censurant ses activités et en supprimant tous les espaces d’expression de positions contraires à la propagande officielle.
Cette situation contraire aux règles démocratiques et au pluralisme politique interpelle le CNRA à moins que vous trouvez normal que la RTS n’ait pas consacré, ne serait-ce qu’une seule seconde, à la présentation du livre de Monsieur Ousmane Sonko, leader de PASTEF LES PATRIOTES, parti politique légalement constitué. Cette situation vous interpelle sauf si vous trouvez normal que des activités importantes de partis politiques de l’opposition ne soient pas couvertes par la télévision nationale.

« Pluriel », émission politique hebdomadaire qui permettait aux différentes formations politiques du pouvoir et de l’opposition de débattre de questions d’actualités, a disparu des programmes de la RTS sans aucune explication.

Votre devoir, qui est de veiller en tant qu’institution de régulation à l’exercice de la liberté d’expression et au respect du pluralisme politique, vous engage à prendre sans délai les dispositions nécessaires pour la couverture des activités de l’opposition par la RTS, pour la relance immédiate de l’émission « Pluriel » et des émissions réservées à l’expression des courants d’opinion (Tribune des partis politiques).
Le CNRA est dans l’obligation de faire respecter les règles d’égalité, d’équilibre et d’équité dans l’espace audiovisuel. Or, sur ce terrain, les carences de votre institution sont manifestes et laissent libre champ à la RTS pour diffuser des émissions qui sont des prétextes à propagande pour le candidat Macky Sall et sa coalition.

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II° LA SITUATION DE LA RTS
La RTS est dirigée actuellement par un homme politique, membre du Secrétariat politique du parti au pouvoir et maire d’une commune, Monsieur Racine TALLA. Depuis sa nomination, ce directeur procède à une instrumentalisation de la RTS à des fins de propagande pour Macky SALL, son parti et ses alliés. Tout aussi important, le directeur en question a atteint l’âge de la retraite et devrait normalement faire valoir ses droits à une pension. Le CNRA est interpellé sur cette question et devrait exiger le départ de Monsieur Racine TALLA de la RTS. La question du départ de Monsieur Racine TALLA et de son remplacement soulève également la question du mode de nomination du directeur général de la RTS. En effet, dans un système démocratique, la nomination du directeur d’une télévision publique devrait se faire par un appel à candidatures pour éviter la politisation de ce service public et son instrumentalisation par le parti au pouvoir.
Le départ de Monsieur Racine TALLA ne règle pas pour autant les problèmes de la RTS. C’est pourquoi, il serait aussi utile d’ordonner un audit pour situer les responsabilités de la gestion administrative et financière que les syndicats et les travailleurs ne cessent de dénoncer.

III° L’INTERDICTION DE LA PUBLICITE POLITIQUE
On constate de plus en plus des publi-reportages politiques sur les chaines de télévision notamment RTS, TFM, 2 STV…Ces reportages, même s’ils sont payants, selon les responsables des télévisions, ne participent pas à l’équilibre des organes de presse et créent une rupture d’égalité entre les citoyens avec un système censitaire d’accès aux médias. Généralement, ce sont les partisans du président de la république qui s’adonnent à cette pratique.
Sous un autre registre, des journalistes, animateurs et communicateurs traditionnels qui ont pris faits et causes pour le parti au pouvoir et qui sont libres d’avoir des positions politiques, utilisent les médias publics pour faire passer leurs messages de propagande déguisée. Il en est de même des animateurs et/ou journalistes qui ont décidé de créer des mouvements de soutien politique et qui continuent à y officier.
Ces situations sont de nature à fausser le jeu démocratique dans l’espace audiovisuel. A cet égard, l’émission JAKARLOO de la TFM n’obéit pas aux exigences légales de pluralisme et d’expression des différents courants d’opinion avec la présence d’un homme politique engagé, membre de la coalition présidentielle qui critique ouvertement les opposants sans droit de réponse. Paradoxalement, vous mettez en garde la SEN TV alors que la RTS fait pire en matière de propagande politique.

Il en est de même du combat de lutte Balla Gaye vs Modou Lô organisé par un promoteur qui menace d’écarter les chaines de télévision qui, selon ses propres termes, sont contre la politique du président Macky Sall. Le battage médiatique autour de ce combat dans la période préélectorale et dont le candidat Macky Sall est le parrain, serait une entorse aux dispositions du code électoral relatives à l’utilisation des médias pendant la période pré électorale.
Le CNRA doit se prononcer sur cette question de façon non équivoque, en rappelant la réglementation en la matière.
Il vous est ainsi demandé d’interdire les temps d’antenne réservés aux publi-reportages et de mettre en demeure les journalistes et communicateurs qui passent leur temps à faire de la propagande pour le régime.

Monsieur le président,
Loin de moi l’idée de jeter l’opprobre ou le discrédit sur votre personne mais je dois à la vérité de dire que votre nomination ne participe pas à rassurer les acteurs politiques surtout ceux de l’opposition au regard de vos états de service et de vos antécédents sous les régimes précédents. Il s’y ajoute que votre proximité avec l’actuel président de la république, qui vous a fait bénéficier d’importants décrets de nomination en si peu de temps, laisse penser que vous lui êtes redevable. Votre position vous oblige à veiller au respect des lois et du pluralisme. Nous attendons donc, des réponses précises à nos interpellations et espérons que les millions mis à la disposition du CNRA vont désormais servir à renforcer le pluralisme et la démocratie dans le secteur de l’audiovisuel.
En tout état de cause, nous ne manquerons pas à notre devoir de vous saisir chaque fois que nous constaterons des manquements à vos obligations légales. Sans répit ! Sans concession.
En vous souhaitant bonne réception, je vous prie de croire Monsieur le président, à l’expression de ma distinguée considération.

Moussa TAYE
Taxawu Senegaal
Sacré Cœur II n° 8635D

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